Jean-Michel NICOLAS

Né en France en 1958 – Vit en France

L’imaginaire sculpté de Jean-Michel Nicolas appelle plusieurs regards. A l’évidence, ce qui frappe l’œil tout d’abord, c’est ce foisonnement d’images, d’objets fragmentaires ou non, incorporés les uns aux autres, triturés, soudés dans une image ultime, unifiée, à la thématique simple et définie à l’avance : Tarzan ou Spoutnik. Cette thématique toutefois, loin de réduire 1’œuvre à sa seule imagerie symbolique, est essentiellement prétexte à la mise en volume et en relief de figures, d’images.
Ce qui importe dans la série des Spoutniks n’est pas tan tant l’allégorie interplanétaire que la dynamique, l’élan, le mouvement, la trajectoire qui sont proposés. Pa éventration des cartes postales, photos, gravures, illustrations – images plates – entrant dans la composition sculpturale et qui en sont la base figurative, les plans s’étagent, l’architecture se met en place la figure humaine découpée, extirpée de son contexte plan, redressée, participe d’un nouvel espace, entre en mouvement et dans la troisième dimension : celle des autres objets que sont les boules, os, fragments de métal, de bois, etc.
Le glissement d’un élément à un autre est soit thématique, soit dynamique. Les pistes se suivent, se chevauchent, visuelles ou sémantiques : crinière d’un cheval, flots, char. Un élan anime les signes et les accouple : la flèche d’un Tarzan bondit vers l’image découpée d’un tigre affublé d’un crâne de mulot. Le coureur démultiplié de Muybridge, décollé de son fond, retrouve sa mobilité perdue dans l’aplat photographique.
Cependant, l’image elle-même disparaît pour laisser place à un souci purement formel, à un besoin plastique de casser le sens. Une nouvelle fois, Jean-Michel Nicolas tente une réunification, une homogénéisation des éléments et de leur nature diversifiée, par homochromie .Le crayonnage sombre des surfaces donne au papier des allures de plomb, au plomb un air de papier mâché. Il y a fusion totale des apparences, dissolution des couleurs. Le papier vert cru de la forêt vierge de carte postale devient métal rayé, griffé, entamé. Chaque élément, mutilé de sa véritable apparence se charge d’un même gris dur, étamé, plombé, métallique.
Fixées au mur lisse, devenu rondes-bosses, les petites sculptures immobiles grignotent l’espace, traînant derrière elles une ombre gris-noir, expurgée de toute image, à l’intensité variable qui affleure comme la face inconnue, imprévue, fugitive d’un imaginaire fragile.

Noëlle Renaude