Anne-Marie SCHNEIDER

Née en France en 1962 - Vit à Paris

Anne-Marie Schneider est née en 1962 à Chauny (France). Elle vit et travaille à Paris. Son travail, d’une renommée internationale, a notamment été présenté à la Documenta de Kassel, au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, à La Monnaie de Paris, à la Fondation Juan Mirò (Barcelone), au LAM (Villeneuve-d’Ascq), à la Fondation Fernet-Branca (Saint-Louis), à La maison rouge (Paris) et a bénéficié de deux rétrospectives en 2017 : au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia (Madrid) et au Musée d’art contemporain-Grand-Hornu (Boussu).

La petite acrylique sur toile de la collection du Frac Auvergne est symptomatique de l’ensemble du travail d’Anne-Marie Schneider : le trait vibrant, la dimension psychologique, le surgissement de la couleur, l’imaginaire fantastique. Elle témoigne d’une irrévérence de l’artiste à l’égard des formes plastiques prédéfinies : le dessin n’est pas représentation mais présentation. En d’autres termes, il s’agit d’un travail où la distance de la pensée à la feuille, de l’émotion à la création, est – presque – abolie. S’y retrouve aussi une belle banalité, caractéristique de cette pratique, dans le sens où les figures génériques et les petites choses se voient entourées d’un pouvoir auratique sans pour autant être esthétisées. Ici, c’est le paysage qui est suggéré par la séparation de la toile en deux bandes horizontales mouchetées de bleu électrique : un arbre (ou une brindille, on remarquera l’absence d’échelle) fend l’espace entre le ciel et le sol et projette une ombre rose fuchsia que l’on jurerait être une silhouette humaine. À noter que la signature, au dos de l’œuvre, est à l’envers : est-ce la preuve que tous les éléments sont interchangeables, l’humain et le végétal, le ciel et la terre, l’imaginaire de l’artiste et le monde qui l’entoure ?

L’utilisation des couleurs pures, le tremblement du tracé, le recours aux formes synthétiques et graphiques peuvent autant acter d’une fascination pour l’enfance que de l’empreinte d’une culture littéraire et verbale. Peindre ou dessiner, c’est parler ou écrire, avec sa voix première et avec ses angoisses. Par endroits friable et texturée, Sans titre est une peinture qui accepte l’échec et l’inclut dans son processus créatif. La simplicité de la composition, la sincérité de la touche et la liberté des sujets donnent au travail d’Anne-Marie Schneider l’aspect d’un journal intime, impudique dans sa forme et cru dans sa facture. La dimension autobiographique y est non négligeable, moins au sens archivistique et documentaire d’un ancrage factuel de l’œuvre dans un contexte historique et géographique spécifique, qu’au sens de l’expérience psychique personnelle, livrée sans atours. Ce travail pourrait entièrement être qualifié de « psychographique », tant dans le sens médical du terme (portrait de la psyché d’un individu) que dans le sens sociologique (l’écriture automatique et la dimension spirituelle d’une pratique). Dans le même temps, – et c’est toute la force singulière de cette pratique – l’œuvre est un témoignage, une preuve irréfutable de quelque chose. Oui mais de quoi ? Elle est peut-être la marque d’un fantasme, d’une hallucination ou d’un engouement, aussi réels et palpables pour l’artiste qu’un objet que l’on peut toucher.

Elora Weill-Engerer