Ecole Supérieure d'Art de Clermont Métropole

Sans titre(s)

Du 12 mars 2013 au 4 avril 2013

Une exposition conçue dans le cadre du Labo de l’’ÉSACM «Commissaires associés» par Benjamin Aubertin, Marina Guyot, Clotilde Jacquet, Alice Jouhet, Alexandre Lavet et Cédric Loire.
Ce groupe d’’étudiants, encadré par Cédric Loire, professeur, a travaillé à la conception, au montage et à la médiation d’une exposition rassemblant des œuvres choisies dans la collection du FRAC Auvergne.
Cette exposition se veut une proposition ouverte,une forme de recherche «en acte», comme un parcours dans les collections du FRAC en dialogue avec le colloque «Pouvoirs du titre» organisés par l’’Ecole Supérieure d’’Art de Clermont Métropole et l’Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, les 11 et 12 mars.

Autres expositions cette même année

Sous l'Amazone coule un fleuve

FRAC Auvergne - 6 rue du Terrail - 63000 Clermont-Ferrand

L’année dernière, lors d’un entretien avec Laure Adler sur France Culture1, l’écrivain Philippe Djian était invité à s’exprimer sur la question du style en littérature : «Il est très compliqué de parler du style, de la langue, d’expliquer ce que c’est. On a découvert un fleuve énorme sous l’Amazone, beaucoup plus grand : c’est ça la langue. Quand vous lisez une histoire, le petit fleuve qui est au-dessus peut être sympathique (miroitement, tranquillité…), mais si cette chose est capable de transformer votre vie c’est parce qu’il y a quelque chose en dessous, et ce sont souvent des textes dont les histoires ne nous ont pas spécialement marqués. C’est comme les infrasons : je crois qu’il y a un infra-récit, qu’il y a quelque chose en-dessous. Si la littérature ne sert pas à ça, elle ne sert à rien. Si vous voulez des histoires, achetez les journaux, il y a plein d’histoires dans les journaux. Si vous allez vers la littérature, n’y allez pas pour lire des histoires. Ce qui est important, pour un auteur, c’est de mettre au point une langue et un style.»

L’art n’a pas pour finalité de raconter des histoires et, inversement, les histoires n’ont pas nécessairement besoin de l’art pour être racontées. Marcel Proust ne dit rien d’autre quand, dans à la Recherche du temps perdu, il montre son personnage définitivement bouleversé par la vision des tableaux d’Auguste Renoir, à tel point que sa vision de la réalité s’en trouve définitivement modifiée : les femmes sont devenues des Renoir, les voitures, l’eau, le ciel sont devenus des Renoir2… Le monde n’est plus le même avant et après les tableaux de Renoir, non pas que Renoir ait créé une nouvelle image du monde ou qu’il ait raconté telle ou telle histoire inédite : le bouleversement provient de la langue picturale elle-même. Quelque chose s’est passé avec ces peintures, leur intonation, le vibratile de leurs couleurs, et un filtre nouveau s’est déposé sur la réalité, comme une lentille polarisante. C’est ce que le philosophe Gilles Deleuze nomme l’ «opération poétique», un état singulier de la langue qui «tremble de tous ses membres». Cela signifie que comprendre une oeuvre d’art, ce n’est plus seulement la considérer dans sa signification ou dans une supposée logique mais admettre qu’elle soit la résultante d’une «opération poétique» par laquelle la langue «n’est plus seulement une instance de connaissance mais qu’elle devient, par le style, une puissance.»3 La très belle image de ce fleuve invisible, qui se déploie à 4000 mètres de profondeur, bien plus lent mais bien plus vaste que l’Amazone, constitue le point de départ de cette exposition qui rassemble plus de 60 oeuvres réalisées par une quarantaine d’artistes de la collection du FRAC Auvergne.

Jean-Charles Vergne

1- France Culture, Hors-Champs, 30 août 2012.
2- Marcel Proust, « Le Côté de Guermantes II », à la recherche du temps perdu, Gallimard, pp.999-1000.
3- Christophe Fiat, La Ritournelle, Editions Léo Scheer, 2002, p.62.

Lire la suite

La Révolte et l'Ennui

commissariat Marc BAUER - 6 rue du terrail - 63000 Clermont Ferrand

À l’occasion du trentième anniversaire de leur création, les Fonds Régionaux d’Art Contemporain ont confié la conception d’une de leurs expositions à un artiste sous la forme d’une carte blanche. Ces projets régionaux feront ensuite l’objet d’une grande exposition collective au Musée des Abattoirs de Toulouse, de septembre à décembre 2013.
Pour le FRAC Auvergne, l’artiste suisse Marc Bauer a conçu La Révolte et l’Ennui en adoptant, comme point de départ, un crâne peint par Denis Laget en 1987, portant sur son envers ce texte du poète René Char : «Les sentiers, les entailles qui longent invisiblement la route, sont notre unique route à nous, qui parlons pour vivre, qui dormons sans nous engourdir sur le côté.» Cette peinture ouvre une réflexion sur différents thèmes, en particulier sur l’usage de la citation et de l’emprunt à des œuvres du passé pour délivrer une vision de la réalité présente. Cette position artistique décalée renvoie à la posture anachronique de l’artiste dandy, développée avec le romantisme, incarnée par de grandes figures qui, de Charles Baudelaire à Marcel Duchamp, ont dessiné les contours d’une certaine idée de la modernité du 19e siècle à aujourd’hui.
Si La Révolte et l’Ennui regroupe des artistes très différents, l’exposition met néanmoins en évidence une pratique commune de la citation qui n’est pas sans produire une certaine mélancolie, doublée par les reprises d’oeuvres – contemporaines ou plus anciennes – redessinées par Marc Bauer comme autant d’éléments documentaires qui ponctuent le parcours qu’il a conçu pour le FRAC Auvergne.

Lire la suite